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Le Blog de Jane Fenuanova.
5 décembre 2012

Brève Histoire du mouvement LGTB en France : d’ Arcadie au FHAR et aux Gouines Rouges.

L'acte fondateur de la visibilité, encore très confidentielle, du mouvement homosexuel en France peut être daté de 1954 avec la fondation de l'association et du mensuel du même nom, Arcadie par André Baudry avec le soutien de Roger Peyrefitte et de Jean Cocteau.

Il s'agit cependant de rester prudent : le "Groupe de contrôle des homosexuels", héritier direct de la "Sous-brigade des pédérastes" du XIX° siècle existe et surveille de près les activités de l'association qui compte à ses débuts de 20 à 40 menbres, essentiellement des intellectuels pouvant montrer leur homosexualité et qui culminera en 1970 avec 15.000 adhérents.

Le contexte politique de l'époque dominé par le Gaullisme et le PCF n'est guère favorable à la visibilité du fait du conservatisme des premiers et de la conception de la pureté de la Classe Ouvrière des seconds qui ne saurait comporter des pédés en son sein.

Nous pouvons d'ailleurs relever que ces deux positions n'évolueront pas jusqu'à très récemment..

L'adhésion à Arcadie qui suppose l'abonnement à la revue, fut interdite aux mineurs dès 1954, et censurée. En 1960, à la promulgation de l’amendement Paul Mirguet comptant l’homosexualité parmi les « fléaux sociaux , Arcadie fonctionne comme un club privé dont l'activité principale est l'organisation de conférences dans ses locaux ainsi qu'un service médical et d'entraide sociale.

Un autre mensuel, FUTUR coexistera durant un an avec Arcadie de janvier 1954 à octobre 1955. Mais ARCADIE reste jusqu'à 1968 la seule association " homophile", selon la terminologie de l'époque, existante.

L'association vivotera ensuite jusqu'en 1982, démodée par l'activisme des années 70 et particulièrement par la naissance du Front Homosexuel d'Action Révolutionnaire (FHAR) et des Gouines Rouges.

Celui-ci apparait en mars 1971, conjointement avec le MLF. Les relations entre les deux groupes sont étroites, les homosexuels s'ajoutant aux féministes et aux Gouines Rouges qui constituent de fait la liaison entre le MLF et le FHAR, (le FHAR refuse le nom d' "organisation" et n'a ni leader ni porte-parole, fonctionnant en AG sur un mode libertaire) autour des figures de Félix Guattari , Guy Hocquenghem et l’écrivaine et cofondatrice du MLF, Françoise d’Eaubonne. Christine Delphy y militera également...

Un premier journal," TOUT-ce que nous voulons : la révolution" parait et contient un manifeste inspiré de celui des " 343 salopes" avec un titre choc : « Nous sommes plus de 343 salopes. Nous nous sommes fait enculer par des Arabes. Nous en sommes fiers et nous recommencerons. »

Les réactions, de l'extrême-droite à une partie de l'extrême gauche en passant par le pouvoir gaulliste rivalisent d'indignation.
Minute écrit " Au milieu de slogans du genre: « La virilité et la propagande sont les deux piliers de la psychologie bourgeoise », on y trouve de doux aveux sur les services rendus par les Arabes aux fils de Sodome.
Dans ce domaine, au moins, le colonialisme se pratique à l’envers.
Pour faire triompher ses mots d’ordre, le F.H.A.R., outre la distribution de tracts dans les boîtes d’invertis etl’organisation des groupes « d’autodéfense » (na!), préconise une alliance avec les lesbiennes contre la société phallocrate.

Violette Leduc avec nous! un bon moyen de mettre en fuite les sales hétéros.
Justement, ces hétérosexuels réactionnaires, « hétéroflics», comme dit le Front, il paraît qu’il y en a beaucoup trop dans la grande famille gauchiste. Ils l’empêchent de se transformer en famille tuyau de poêle..." tandis que Lutte Ouvrière se distingue également : " On peut se demander ce qui peut amener des gens qui se disent révolutionnaires à éditer un journal dont le contenu est à la hauteur de graffitis de pissotières.
« Faire la révolution, veut réellement dire CHANGER LA VIE (et d’abord SA vie) », écrit Tout (et c’est lui quisouligne).

Voilà comment l’individualisme petit-bourgeois en arrive, après s’être réclamé du stalinisme, et du socialisme dans un seul pays, à se faire le chantre du «socialisme » dans un seul lit."

Le numéro est aussitôt saisi, Jean-Paul Sartre est poursuivi pour y avoir écrit... C'est le Conseil Constitutionnel qui stoppera les poursuites en déclarant inconstitutionel les atteintes à la liberté d'expression.
Le premier mai 1971, pour la première fois en France, pédés, gouines et transsexuel-les prennent part au traditionnel défilé en s'affichant au grand jour. Deux ans auparavant, de l'autre côté de l'atlantique, les émeutes de Stonewall ont eu lieu, donnant naissance à la première Gay Pride.**

Manifestation du FHAR.

Le Service d'Ordre de la CGT tente d'expulser ces pédales gauchistes qui font par trop mauvais genre...
Les Comité d'Action Lycéens les rejoignent et le FHAR colle à la Fédération Anarchiste, restant ainsi dans le défilé.
Les réactions des autres syndicats, sans être aussi violentes, sont plus que mitigées...

A la suite de cette preière manifestation, le FHAR prend de l'ampleur et se dévellope en province. Les militant-e-s se revendiquant du FHAR sont au nombre de 4000, tandis que l'ordonnance de Vichy, confirmée en 1945 spécifie toujours que" sera puni de six mois à trois ans de prison et de
soixante à quinze mille francs d'amende quiconque «aura commis un acte impudique ou contre-nature avec un individu de son sexe, mineur de 21 ans". Le courrier afflue de partout, des groupes se créent un peu patout : cinq (dont trois
constituent la section française de l'I.H.R.) à Paris et quinze
groupes font le même travail en province. Certains de ces
groupes possèdent leur journal: Le Doigt au cul à Nice, Le
Fléau social par l'I.H.R, Internationale Homosexuelle Révolutionnaire fondée en 1973 et proche de l'Internationale Situationniste.

C'est dans ce contexte que les premières prises de distances des féministes du MLF et des Gouines rouges ont lieu, qui jugent le mouvement trop spécifiquement masculin et ne prenant que peu en compte la spécificité de leur mouvement.

L'apparition des " gazolines", se revendiquant du "spontanéisme", rompant avec les "politiques" de l'IHR, va créer une cetaine confusion au sein du FHAR. En poussant la provocation à l'extrême, en dénonçant le pouvoir supposé des intellectuels membres du FHAR, puis en apparaissant voilées à l'enterrement de Pierre Overney, militant Maoïste tué par un vigile de chez Renault aux cris de " « Liz Taylor, Overney, même combat ! », elles précipitent une scission déjà amorcée entre des groupes n'ayant plus en commun que des slogans.
Daniel Guérin quitte le groupe, bientôt suivi par Françoise d’Eaubonne qui n'y voit plus "qu'un vulgaire lieu de drague".

La dissolution officielle des FHAR interviendra en février 1974, après l'interdiction par la police des Assemblées Générales aux Beaux-Arts et surtout l'abandon par ses membres de ses actions spectaculaires.

L'histoire du FHAR ne s'arrête cependant pas là.
Ils laissent derrière eux des héritiers directs : les Groupes de libération homosexuels (GLH), la plupart situés en province, le GLH-PQ (politique et quotidien) et les groupes Sexpol (sexe et politique), qui ont autant d’histoires propres. Leurs objectifs et revendications, issus du FHAR, perdureront à travers les associations homosexuelles des années 1980, comme les Universités d’été euro-méditerranéennes des homosexualités et le CUARH ou la création de la revue Gai Pied.

Mais ceci est une autre histoire...
* Source : Rapport contre la normalité, FHAR 1971, disponible ici : http://inventin.lautre.net/livres/FHAR.pdf

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C
Réédition du "Rapport contre la normalité" du FHAR (1971)<br /> <br /> 130 p 15 €<br /> <br /> Disponible début juin en librairie ou directement franco de port<br /> <br /> chèque libellé à GKC adressé à QuestionDeGenre/GKC<br /> <br /> 5 rue du Pavillon 34000 Montpellier<br /> <br /> <br /> <br /> catalogue disponible sur http://gaykitschcamp.blogspot.fr<br /> <br /> livres d'occasion/genre : http://www.priceminister.com/boutique/gaykitsch<br /> <br /> https://www.facebook.com/groups/246304575386497/<br /> <br /> tél 06 03 55 45 66
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